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La diffusion de musique de fond dans les avions peut être un problème de droit d'auteur selon la Cour de l'UE

Date :

La Cour européenne a statué dans des affaires jointes C‑775/21 и C‑826/21, Blue Air Aviation SA / UCMR — ADA Asociaţia pentru Drepturi de Autor a Compozitorilor.

Ces différends portent sur la question de savoir si la diffusion de musique dans les avions et les trains peut constituer une communication au public du point de vue du droit d'auteur. Les cas ont le contexte suivant :

Arrêt du 775 juin 21, C ‑ XNUMX/XNUMX

Le UCMR – ADA est un organisme de gestion collective qui gère les droits d'auteur musicaux.

Le 2 mars 2018, cet organisme a introduit une action devant le tribunal régional de Bucarest, Roumanie contre la compagnie de transport aérien Blue Air, visant à obtenir le paiement des rémunérations restant dues et des pénalités pour la communication au public d'œuvres musicales à bord d'aéronefs exploités par Blue Air, pour lesquels Blue Air n'avait pas obtenu de licence.

Devant cette juridiction, Blue Air a fait valoir qu'elle exploite 28 aéronefs et que, bien qu'elle dispose du logiciel nécessaire à la diffusion d'œuvres musicales dans 22 de ces 28 aéronefs, elle n'a communiqué au public, après obtention de la licence requise, qu'une seule œuvre musicale comme musique de fond, dans 14 de ces avions.

Suite à ces précisions, l'UCMR – ADA a élargi ses demandes de paiement, estimant que l'existence de systèmes sonores dans environ 22 aéronefs justifiait la conclusion que des œuvres protégées avaient été communiquées au public dans l'ensemble des aéronefs de la flotte de Blue Air.

Par jugement du 8 avril 2019, l'action de l'UCMR – ADA a été accueillie. En substance, le tribunal régional de Bucarest a jugé, sur la base des arrêts du 7 décembre 2006, SGAE (C‑306/05, EU:C:2006:764), et du 15 mars 2012, Phonographic Performance (Ireland) ( C‑162/10, EU:C:2012:141), que le fait que Blue Air ait équipé les moyens de transport qu'elle exploite de dispositifs permettant la communication au public d'œuvres musicales en tant que musique de fond faisait naître une présomption réfragable selon laquelle ces œuvres ont été utilisées ; cela imposait de constater que tout aéronef équipé d'un système de sonorisation utilise ce dispositif pour la communication au public de l'œuvre musicale en cause, sans qu'aucune autre preuve ne soit nécessaire à cet égard.

Blue Air a interjeté appel de cette décision devant la cour d'appel de Bucarest (Roumanie), qui est la juridiction de renvoi, en faisant notamment valoir qu'elle n'avait pas communiqué de musique de fond à bord de l'aéronef qu'elle exploite pour lequel aucune licence n'avait été obtenue, et que la simple existence d'installations matérielles n'équivalait pas à une communication au public d'œuvres musicales. Elle a ajouté que, par la diffusion de musique de fond, elle ne poursuivait aucun but lucratif. Enfin, elle a précisé que l'existence de systèmes sonores dans les aéronefs est dictée par des raisons de sécurité, afin de permettre la communication entre les membres de l'équipage et la communication entre cet équipage et les passagers.

La juridiction de renvoi précise que la question de savoir si, compte tenu de l'absence d'objectif lucratif, la communication d'une œuvre musicale en tant que musique de fond constitue une communication au public au sens de l'article 3 de la directive 2001/29, n'est pas sans équivoque . Par ailleurs, en cas de réponse affirmative à cette question, la juridiction de renvoi soulève la question du niveau de preuve requis à cet égard. Elle note que, conformément à la jurisprudence de certaines juridictions nationales, lorsqu'un établissement exerçant une activité économique déterminée est cité dans la méthodologie visée au point 23 du présent arrêt, il existe une présomption réfragable selon laquelle les œuvres protégées par le droit d'auteur sont communiquées au public dans ce lieu. Une telle présomption se justifierait, notamment, par le fait qu'il est impossible pour les organismes de gestion collective gérant systématiquement le droit d'auteur de contrôler tous les lieux où pourraient avoir lieu des actes d'utilisation d'œuvres de la création intellectuelle.

Dans ces circonstances, la cour d'appel de Bucarest a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes :

«(1) L'article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29/CE […] doit-il être interprété en ce sens que la diffusion, à l'intérieur d'un aéronef commercial occupé par des passagers, d'une œuvre musicale ou d'un fragment d'œuvre musicale au décollage, à l'atterrissage ou à tout moment au cours d'un vol, via le système de sonorisation de l'aéronef, constitue une communication au public au sens de cette disposition, notamment (mais non exclusivement) au regard du critère tenant à l'objectif lucratif de la communication?

Si la réponse à la première question est affirmative :

(2) L'existence à bord de l'aéronef d'un système d'adressage requis par la législation sur la sécurité du trafic aérien constitue-t-elle une base suffisante pour établir une présomption réfutable quant à la communication au public d'œuvres musicales à bord de cet aéronef ?

Si la réponse à cette question est négative :

(3) La présence à bord de l'aéronef d'un système d'adressage requis par la législation sur la sécurité du trafic aérien et d'un logiciel permettant la communication de phonogrammes (contenant des œuvres musicales protégées) via ce système constitue-t-elle une base suffisante pour établir une présomption réfragable quant à la communication au public d'œuvres musicales à bord de cet avion ?

Arrêt du 826 juin 21, C ‑ XNUMX/XNUMX

L'UPFR est un organisme de gestion collective des droits voisins des producteurs de phonogrammes.

Le 2 décembre 2013, cet organisme a assigné la CFR, une entreprise de transport ferroviaire, en vue d'obtenir le paiement des rémunérations restant dues et des pénalités pour la communication au public d'œuvres musicales à bord des voitures de voyageurs exploitées par la CFR. Elle a soutenu, dans ce contexte, que la législation ferroviaire applicable imposait que certains des trains exploités par le CFR soient équipés de systèmes de sonorisation et a fait valoir que la présence de tels systèmes équivalait à une communication au public d'ouvrages au sens de l'article 3( 1) de la directive 2001/29.

Cette action a été rejetée par le tribunal régional de Bucarest, qui a estimé que si la simple installation d'un système de sonorisation permettant techniquement l'accès du public à des enregistrements sonores constitue une communication au public d'œuvres musicales, il n'était pas prouvé que les trains de service avait été équipé d'un tel système.

L'UPFR a interjeté appel de cette décision devant la Curtea de Apel Bucureşti (cour d'appel de Bucarest), qui est la juridiction de renvoi.

La juridiction de renvoi relève que, dans la jurisprudence nationale, la majorité estime, notamment sur la base de l'arrêt du 7 décembre 2006, SGAE (C‑306/05, EU:C:2006:764), que la présence de systèmes sonores dans un wagon équivaut à une communication au public d'œuvres musicales. Toutefois, la juridiction de renvoi est incertaine à cet égard.

Dans ces circonstances, la cour d'appel de Bucarest a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes :

«(1) Un transporteur ferroviaire qui utilise des voitures ferroviaires dans lesquelles sont installés des systèmes sonores destinés à la communication d'informations aux voyageurs fait-il ainsi une communication au public au sens de l'article 3 de la directive 2001/29/CE …?

(2) L'article 3 de la directive 2001/29/CE […] s'oppose-t-il à une législation nationale qui établit une présomption réfragable de communication au public sur la base de l'existence de sonorisations, lorsque ces sonorisations sont imposées par d'autres dispositions législatives régissant la l'activité du transporteur ? »

La décision de la Cour :

  1. Article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information

doit être interprété en ce sens que la diffusion, dans un moyen de transport de voyageurs, d'une œuvre musicale en tant que musique de fond constitue une communication au public au sens de cette disposition.

  1. L'article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29 et l'article 8, paragraphe 2, de la directive 2006/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur sur le domaine de la propriété intellectuelle

doit être interprété en ce sens que l'installation, à bord d'un moyen de transport, d'un équipement de sonorisation, et, le cas échéant, d'un logiciel permettant la diffusion d'une musique d'ambiance, ne constitue pas une communication au public au sens de ces dispositions.

  1. Article 8, paragraphe 2, de la directive 2006/115

doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale, telle qu'interprétée par les juridictions nationales, qui établit une présomption réfragable selon laquelle les œuvres musicales sont communiquées au public en raison de la présence de systèmes de sonorisation dans les moyens de transport.

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