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Blocage DNS : Canal+ poursuit Cloudflare, Google et Cisco pour lutter contre le piratage

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Lorsque la chaîne Canal+ a obtenu des injonctions pour bloquer les sites de streaming sportifs populaires, notamment Footybite et Streamcheck, les FAI français ont été contraints de mettre en œuvre le blocage DNS. En réponse, certains utilisateurs se sont tournés vers des fournisseurs DNS tiers, un trou que Canal+ souhaite désormais combler. Par le biais d'une action en justice intentée devant un tribunal de Paris, le diffuseur espère contraindre Cloudflare, Google et Cisco à mettre en œuvre des mesures similaires de blocage DNS.

L’industrie musicale a obtenu une injonction pionnière pour contraindre les FAI danois à mettre en œuvre des mesures de blocage de sites retour à 2006.

L'objectif était de limiter l'accès à la plateforme russe de téléchargement de musique sans licence AllofMP3, mais cette action représentait également la fin d'un blocage de sites encore exploité aujourd'hui.

Canal+, diffuseur et promoteur du blocage de sites, estime que lorsque les fournisseurs de services mettent en œuvre des mesures techniques pour empêcher l'accès aux sites pirates, cela contribue à réduire les taux de piratage. Malheureusement, les obstacles en ligne qui dépendent d’ajustements techniques se heurtent toujours à d’autres ajustements techniques conçus pour les contourner.

Protéger les sports en direct

Un reportage du journal français l’Informé présente un cadre assez typique adopté par les ayants droit en Europe. Pour limiter l'accès aux flux sportifs en direct piratés, Canal+ a intenté cette année une action en justice en France, arguant que les FAI locaux devraient empêcher les clients d'accéder à plusieurs sites de streaming pirates.

Grâce à Footybite.co, Streamcheck.link, SportBay.sx, TVFutbol.info et Catchystream.com, les internautes ont pu regarder le football de la Premier League et de la Ligue des Champions, ainsi que les matchs du Top 14 des clubs de rugby, sans payer Canal+, le titulaire des droits local.

Après que les décisions ont été favorables à Canal+, les FAI, dont Orange, SFR, OutreMer Télécom, Free et Bouygues Télécom, ont été contraints de mettre en place des mesures de blocage. Cela signifiait que lorsque les clients des FAI tentaient de visiter l’un des domaines ci-dessus, les résolveurs DNS respectifs des FAI fournissaient des réponses non authentiques, refusant ainsi aux clients l’accès aux sites.

Contournement et nouvelles poursuites judiciaires

La réponse au blocage des FAI par des clients de plus en plus avisés a été de modifier leurs paramètres réseau pour remplacer les serveurs DNS de leurs FAI par ceux proposés par des fournisseurs tiers non concernés. En passant aux serveurs DNS proposés par Cloudflare, Google, et Cisco (OpenDNS), les domaines ont fonctionné comme prévu. Cette réponse tout à fait prévisible est maintenant contrée par une autre.

Après avoir enfoncé le levier juste assez loin pour obtenir les premières ordonnances de blocage, Canal+ revient désormais devant les tribunaux dans l’espoir de remédier aux lacunes des ordonnances de blocage. Après avoir échoué à parvenir à une coopération volontaire, rapporte l’Informé (paywall) que Canal+ poursuit désormais Cloudflare, Google et Cisco devant le tribunal judiciaire de Paris, pour imposer des mesures similaires de blocage DNS.

Base juridique : Article L333-10

Selon Article L333-10 du Code du sport (en vigueur en janvier 2022), en cas de « violations graves et répétées » de la part d'un « service de communication publique en ligne » dont l'objectif principal est la diffusion non autorisée de compétitions sportives, les ayants droit peuvent saisir la justice pour exiger « toutes les mesures proportionnées ». susceptible de prévenir ou de faire cesser cette contrefaçon, contre toute personne susceptible de contribuer à y remédier.

Les mesures proportionnées incluent le blocage, la suppression ou la désindexation des services de communication (en l’occurrence les sites de streaming pirates) lorsqu’ils répondent aux critères ci-dessus.

Le tribunal judiciaire peut ordonner la mise en œuvre de ces mesures « pour chacun des jours figurant au calendrier officiel de la compétition ou de l'événement sportif, dans la limite d'un délai de douze mois ». Concernant les compétitions que Canal+ espère protéger, c'est-à-dire jusqu'au 19 mai 2024 pour la Premier League, jusqu'au 1er juin 2024 pour la Ligue des Champions et jusqu'au 29 juin 2024 pour le Top 14.

Quelle est la gravité de la situation de contournement ?

Selon des rapports détaillés publiés par le régulateur des télécommunications Arcom, les mesures de blocage DNS réservées aux FAI ont connu un énorme succès en France.

Publié en mai 2023, le rapport 2022 de l’Arcom constate que l’audience globale des retransmissions sportives illicites a diminué de 41 % entre 2021 et 2022, passant de 2.8 millions d’internautes en moyenne à 1.6 million.

Arcom-streams-2022

Concernant le contournement des mesures de blocage, Arcom rapportait en mai 2023 que, confrontés à un site bloqué, près de la moitié des internautes contrevenants (46 %) abandonnaient complètement l'idée de regarder le contenu.

Parmi tous les utilisateurs contrevenants, seulement 6 % ont tenté de contourner les mesures de blocage en utilisant un DNS alternatif, un VPN ou une méthode similaire.

>france-dns-vpn-blocage

Même si le contournement des mesures de blocage ne semble pas être un problème particulièrement important en France à l’heure actuelle, Arcom note qu’elle restera vigilante à l’avenir.

Par curiosité, nous avons recherché des signes de blocage en France à partir des données fournies par l'Observatoire Ouvert des Interférences de Réseau (OONI). Le système semble détecter le blocage des sites pirates en France comme une « anomalie » (jaune) plutôt que comme un blocage pur et simple confirmé (rouge).

La France bloque la circulation

Les sections vertes peuvent indiquer qu'un nombre relativement restreint d'utilisateurs parviennent à accéder à des domaines réputés pour leurs liens avec le piratage. Que ce volume justifie de traîner les fournisseurs DNS tiers devant les tribunaux est une autre affaire.

Cependant, on ne peut pas exclure qu’il y ait aussi un élément stratégique dans la plainte de Canal+ ; un autre coup de coin, des progrès plus progressifs, puis un blocage DNS toujours plus étendu en préparation pour tout ce qui va suivre.

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